Vice caché: bruit excessif de la capote d'un cabriolet

 L'acheteur demande l'annulation de la vente (bruit de la capote d'un cabriolet)

Résumé:

Vices cachés automobiles Marque : Mercedes. Classe G, version cabriolet; Problème mécanique : le propriétaire ne pouvait pas écouter le musique au-delà de 100 120 km/h. 89 décibels au-dessus du seuil de danger pour l'homme; la vente est annulée et la société Mercedes à payer 92 400 euros au propriétaire en échange de la restitution du véhicule. Date : 22 septembre 2011.

L'expert judiciaire écarte une non conformité du véhicule à la spécification technique du constructeur

L'expert judiciaire a relevé que l'acquisition d'un tel véhicule ne peut être réalisée que via une plaquette commerciale, car le modèle est fabriqué à la commande'.

Il a constaté que le bruit dans l'habitacle atteint 70 décibels, capote fermée, dès que la vitesse de 60 km/h est atteinte et dépasse les 80 et même les 90 décibels à 120 ou 130 km/h.

L'ouverture de la capote diminue, à dire d'expert, la perception subjective du bruit, mais sa réalité demeure.

Sans préjudice du risque pour la santé que crée l'exposition à de pareils niveaux sonores, il en résulte, contrairement à ce que soutient la société Mercedes Benz, qu'à dire d'expert, à partir de 80 dBA, il est impossible de se parler'.

Pour autant, l'expert a ainsi répondu aux questions résultant du jugement le désignant, dans les termes précis où elles lui étaient posées :

- l'installation phonique est conforme à ce qu'on peut en attendre

- sur le plan technique, il n'existe pas de désordre sur ce véhicule.

C'est dire, comme l'a retenu le tribunal, que cette voiture est conforme à la spécification technique du constructeur. Mais il n'en résulte pas qu'elle n'est pas atteinte d'un vice, qui peut découler précisément d'une erreur de conception.

MERCEDES prétend qu'il s'agit d'un véhicule "tout terrain" dont on peut attendre le même confort

 Or, ce qu on peut attendre d un véhicule acheté en France et destiné à rouler en France est, pour un consommateur moyen, qu'il lui permette d'emprunter le réseau routier et autoroutier français sans s'exposer à un niveau de bruit dangereux pour la santé et, en tout cas, très inconfortable.

L'absence de norme réglementaire régissant le bruit maximum dans l'habitacle d'un véhicule n'implique nullement, au plan des obligations contractuelles des parties à la vente, que l'acquéreur a entendu acheter un véhicule dans lequel il est interdit de converser ou d'écouter de la musique à une vitesse supérieure à 60 km/h.

En effet, si ce dernier est décrit dans la plaquette de présentation comme un grand classique du tout terrain', il est aussi présenté comme une voiture aux mille facettes , qui maîtrise les terrains les plus ardus avec la même facilité qu'il effectue les dépassements', doté d un comportement routier optimal et particulièrement discret', car une voiture qui porte l étoile Mercedes est une promesse de qualité et de finition précise' ; il est notamment doté d un coffre suffisamment grand pour votre prochain voyage autour du monde'.

Il est encore indiqué que les systèmes audio offrent une qualité sonore sans pareille ; il est d ailleurs à noter que, parmi d'autre options, M. B. a fait choix d'équiper son véhicule d'un chargeur apte à contenir six compact disques.

Selon la notice, encore, pour la Classe G, les véritables épreuves commencent en dehors de la route ; nous l'y préparons sur nos parcours d'essais tout terrain ; la classe G doit d'abord y passer son examen de conduite avant de passer le brevet de chauffeur de maître sur les boulevards'.

La voiture ainsi décrite n'est donc pas un simple tout terrain, comme le soutient la société Mercedes Benz, mais un véhicule offrant un confort rare - voire un luxe rare, le prix de 92 400 euros en témoigne - en mode normal d'utilisation et capable en outre d'affronter dans les mêmes conditions les terrains les plus difficiles.

MERCEDES plaide l'asbence de valeur contractuelle de la plaquette commerciale

Cette société soutient encore que cette plaquette commerciale n'a aucune valeur contractuelle ; d'une part, cependant, elle ne le précise pas ; d'autre part, s'agissant d'un véhicule fabriqué sur commande, l'acquéreur ne dispose que des informations qu'elle contient et auxquelles il est donc obligé de se fier.

En conséquence, un décalage entre cette description et la réalité peut constituer un manquement aux obligations du vendeur.

Les juges qualifient le défaut de vice caché et annulent la vente

Le vendeur garantissait un haut niveau de confort - bruit de la capote excessif

Dès lors que le bruit produit par la capote excède largement le seuil habituellement constaté dans l'habitacle d'un véhicule de tourisme et qu'il résulte des informations qu'il avait données que le vendeur garantissait au contraire un haut niveau de confort, le véhicule en question est bien atteint d'un vice qui, apprécié à la mesure de la nature, des caractéristiques et de la destination de la chose vendue, est assez grave pour en diminuer tellement l'usage que M. B. ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il l'avait connu.

Un vice non apparent y compris après un essai routier

Pour soutenir que ce vice n'était pas caché, la société Mercedes Benz fait valoir qu'il est immédiatement décelable par un acquéreur profane, que le bruit en question est par définition apparu dans ses premières manifestations au moment de la vente et que la prétention de l'acquéreur, qui n'aurait pas été exprimée concomitamment doit être rejetée.

Les seuls paragraphes paraissant en rapport avec son assertion exposent qu après avoir pris possession du dit véhicule et en roulant notamment sur des nationales et le réseau autoroutier où la vitesse autorisée est supérieure à 60km/h, M. B. se rendit compte que le véhicule faisait un bruit anormal dès que la vitesse de conduite s'élevait' et qu il lui était impossible d essayer le véhicule dans l'enceinte du garage Mercedes ou à proximité dans la mesure où la vitesse au sein de ladite enceinte et dans les rues adjacentes ne peut être supérieure à 60 km/h'.

En déduire qu'il concéderait ainsi avoir eu connaissance du vice dès la livraison dénature ces conclusions.

Le fait que M. B. en a rapidement pris conscience sans exprimer concomitamment sa prétention est sans incidence sur caractère caché du vice lors de la vente, comme sur la recevabilité ou le bien fondé de cette prétention.

L'acheteur n'a pu se convaincre lui même de ce vice, qui n'était pas apparent lors de la vente.

Il est enfin, à exclure qu'il l'ait de toute façon connu pour avoir circulé dans le désert à bord d'un véhicule similaire, de telles circonstances n'étant pas celles dans lesquelles se manifeste le problème.

Absence de solution technique permettant de remédier au problème

A dire d'expert, il n'existe pas de solution technique capable de remédier au désordre, car il faudrait revoir la conception de la capote, ce qui conduirait à un véhicule différent.

Deux courriers d'artisans selliers confirment cette conclusion ('tout ajout empêcherait le fonctionnement de la capote électrique, je ne vois pas quelle solution apporter, je ne peux rien faire de satisfaisant').

En conséquence, l'action rédhibitoire est fondée, la résolution du contrat doit être prononcée.

Rejet de la demande d'indemnité du constructeur pour l'utilisation de la chose vendue ou à l'usure résultant de cette utilisation

En matière de garantie des vices cachés, lorsque l'acquéreur exerce l'action rédhibitoire prévue à l'article 1644 du code civil, le vendeur n'est pas fondé à obtenir une indemnité liée à l'utilisation de la chose vendue ou à l'usure résultant de cette utilisation ; il n'y a pas lieu à la minoration demandée par la société Mercedes, tenue de restituer le prix qu'elle a reçu et ses autres réclamations se trouvent dépourvues de fondement, dès lors que l'action principale est reçue.

Le constructeur MERCEDES condamné à rembourser le prix de vente de 92.400 euros

"- Condamne la société Mercedes Benz Lyon à payer à M. B. la somme de 92 400 euros, contre restitution du véhicule immatriculé 410 BCH 34, dans les locaux de la société Mercedes Benz Lyon, à diligence de M. B.,"

2.500 euros de frais d'avocat

"- Condamne la société Mercedes Benz Lyon à payer à M. B. la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,"

 CA Lyon, CH. CIVILE 01 A, 22 septembre 2011, n° 10/03978

 

 

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